La réforme des lois électorales pour mettre fin aux pratiques de corruption, la révision du découpage électoral et du mode de scrutin, ainsi que les alliances avec les autres partis du champ politique marocain sont les sujets sur lesquels a porté l’entretien accordé par le Premier secrétaire de l’USFP, Driss Lachguar, au quotidien Al Akhbar et paru dans l’édition de jeudi dernier.
S’agissant de la réforme des lois électorales, le dirigeant ittihadi a rappelé la récente réunion entre le ministre de l’Intérieur et les représentants des partis politiques ; réunion durant laquelle les participants se sont mis d’accord sur la méthodologie concernant le débat à entamer à ce propos. Selon cette méthodologie, les formations politiques doivent présenter leurs mémorandums (avant le 17 juillet) contenant « les propositions de chaque parti afin de compiler ce qui a été convenu et de compiler ce qui n’a pas été convenu, après quoi le ministre de l’Intérieur sera chargé d’organiser les consultations afin de parvenir à un quasi-consensus sur les propositions retenues et présentées sous forme de projets de loi. Le débat porte principalement sur le Code électoral, la loi relative aux partis et le financement public de ces derniers ».
Selon Driss Lachguar, l’USFP a beaucoup travaillé sur les lois électorales et a une production théorique importante dans le domaine de l’amélioration des lois afférentes au processus électoral. « Nous sommes la première force de proposition concernant le processus électoral », a-t-il souligné dans cet entretien réalisé par le journaliste Mohammed El Youbi. Et de préciser : « La suppression des couleurs des bulletins de vote et l’utilisation du bulletin de vote unique sont des propositions de l’USFP ».
Il a également indiqué qu’ « il y a eu une certaine amélioration, mais il nous manque encore beaucoup de choses, parce que la corruption électorale est basée sur l’utilisation de l’argent, c’est-à-dire la corruption tout court et sur l’instrumentalisation de la religion, c’est-à-dire le discours religieux ».
Concernant l’utilisation de l’argent, le dirigeant socialiste a réitéré son appel à associer des institutions nationales dans la lutte contre la corruption telles que l’Instance nationale de la probité, de la prévention et de la lutte contre la corruption (INPPLC) et le Conseil national des droits de l’Homme (CNDH), soulignant la nécessité de réviser le système électoral et d’alourdir les peines prévues par la loi contre la prévarication électorale car il s’agit ici d’un crime portant atteinte à la société et à la patrie.
Selon le dirigeant du Parti de la Rose, la crise sanitaire du Covid-19 a renforcé la confiance entre le peuple marocain et ses institutions nationales et en vue de la maintenir dans ces conditions difficiles et d’augmenter le taux de participation aux scrutins, il est nécessaire d’opérer préalablement « de réelles ruptures avec toutes les pratiques du passé».
Au cas où la crise sanitaire perdurerait, Driss Lachguar propose « d’organiser toutes les échéances électorales (communales, provinciales, régionales, législatives et professionnelles) en une seule journée, et il faudra donc réviser les lois électorales dans ce sens ». Cette révision est d’autant plus nécessaire pour résoudre quelques problématiques comme celle de l’inscription automatique sur les listes électorales et l’obligation de s’y inscrire.
Le Premier secrétaire a souligné qu’il y a aussi une problématique importante liée à la question des candidatures, « car il y a des élus et des candidats qui n’ont pas déclaré leurs biens et des partis qui ont bénéficié du financement public et n’ont pas soumis la comptabilité de leurs dépenses à la Cour des comptes, de sorte que des dispositions légales doivent être prévues pour prévoir des sanctions contre tous les contrevenants ». A ce propos, le dirigeant ittihadi avance une proposition fort importante. En l’occurrence celle de prendre en compte « les rapports de la Cour des comptes entre deux élections comme étant un critère essentiel pour l’octroi du financement public aux partis politiques lors des prochaines échéances électorales. Je connais des partis qui ont reçu de l’argent public et n’ont présenté aucun candidat aux élections et ce qui est encore plus grave, c’est qu’ils n’ont présenté aucun document justificatif de leurs dépenses. Et il se peut que ces partis reçoivent encore une fois un financement public de la même façon lors des prochaines échéances. Et il y a des partis qui ont reçu des millions de dirhams pour financer leurs campagnes électorales et n’ont pas produit l’état des pièces justificatives ». Et Driss Lachguar de marteler : « Il serait absurde de continuer à financer ces partis avec des deniers publics. Il est temps d’appliquer la loi dans ce genre d’affaires ».
Le Premier secrétaire de l’USFP a également abordé la question du découpage électoral. Dans ce cas, il a appelé à la nécessité de mettre en place les mesures qui seraient à même d’« assurer l’égalité des chances » entre tous les partis politiques. D’où la nécessité d’un nouveau découpage électoral.
Selon lui, la loi sur les partis doit être également revue, car elle comporte encore certaines contradictions, notamment en ce qui concerne la transhumance des élus. A titre d’exemple, la loi des partis politiques confère au parlementaire plus d’autorité que celle de son parti, alors que la loi organique relative aux communes accorde un pouvoir réel aux partis, car il est impossible, selon cette loi, qu’une personne se présente à la présidence d’une commune sans accréditation de son parti. « C’est pourquoi cette contradiction doit être résolue pour que les partis puissent jouer pleinement leur rôle au sein de la société », a-t-il affirmé.
Concernant l’adoption du mode de scrutin uninominal au lieu et place du mode de scrutin de liste, Driss Lachguar a affirmé que l’adoption de ce dernier mode « a été une proposition présentée par l’USFP » et que « feu Abderrahmane El Youssoufi en était l’un des plus grands défenseurs », et ce dans le but de lutter contre la corruption électorale et l’achat de voix et pour que le débat soit un débat d’idées et de programmes au lieu d’être une compétition entre des personnes. « Ses objectifs étaient, donc, nobles », a souligné Driss Lachguar, qui a confirmé, par ailleurs, que « la pratique a prouvé le contraire ». Selon son analyse, le rôle de représentation et de médiation des élus dans le système électoral a fortement diminué. Et ils ne sont plus proches des préoccupations et des attentes des citoyens de leurs circonscriptions. Et le dirigeant ittihadi de poursuivre : « Le mode de scrutin de liste n’a pas atteint les objectifs pour lesquels il a été mis en place, nous avons donc exigé le retour au mode de scrutin uninominal, mais nous n’avons pas vu de partis enthousiastes à ce propos ; aussi nous avons suggéré, lors du dernier Conseil national, que ce mode soit adopté de manière progressive durant une période transitoire lors des élections communales. Et si l’expérience confirme la justesse de notre proposition, on peut alors le généraliser pour les autres échéances électorales après cinq ans. Dans le cas contraire, nous n’avons aucun problème à maintenir le mode de scrutin de liste, car l’objectif pour nous est de renforcer le système de représentation et la démocratie ».
Il a ajouté que le mode de scrutin uninominal proposé par l’USFP n’est dirigé contre aucun parti politique, notamment le PJD. « Tous ceux qui pensent de cette manière se trompent lourdement, car notre proposition ne le vise pas, parce que toutes les composantes du champ partisan de notre pays, et pas le PJD uniquement, ne partagent pas la même vision que nous à propos de cette proposition. Cela signifie-t-il que notre proposition vise aussi les autres partis ? », a souligné Driss Lachguar avant de poser la question suivante : « Est-ce que le PJD dispose d’une étude confirmant que l’adoption du mode de scrutin uninominal diminuera le nombre de sièges qu’il obtiendra lors des élections ? ». « Leurs calculs sont faux tout simplement parce qu’ils sont fondés sur de fausses hypothèses », a-t-il martelé.
Lors de cet entretien, le dirigeant ittihadi a aussi évoqué la question de la coordination avec le parti de l’Istiqlal, précisant que « cette coordination n’a rien à voir avec la coalition » tout en soulignant que « les alliances se nouent sur la base de programmes et des résultats des élections. Si nous choisissons d’être dans l’opposition, nous devrons rechercher des alliances avec les partis d’opposition et si nous choisissons de participer au gouvernement, on doit alors rechercher nos alliés dans la majorité gouvernementale sur la base de programmes et de projets sociétaux ».
Il a également indiqué que l’USFP est ouvert à tous les partis politiques sans exception, y compris les partis de gauche, et qu’il y a une coordination avec le RNI et le PAM.
Concernant l’alliance avec le PJD, Driss Lachguar a laissé entendre que cette alliance « était une catastrophe », rappelant qu’il est le seul dirigeant politique à appeler depuis le début de la crise sanitaire actuelle à la constitution d’un gouvernement d’union nationale même si l’USFP fait partie de la coalition gouvernementale, pour faire face aux effets néfastes de la crise aussi bien sur les plans économique que social. Mais cet appel a été mal compris et interprété de manière malveillante.

Mourad Tabet

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