Habib El Malki : Pour sortir du marasme intellectuel et politique qui sévit dans le monde arabe, celui-ci a besoin d’une nouvelle raison. Croire en la raison, c’est être optimiste de facto

Qui croit en la raison, reste toujours optimiste ». Habib El Malki, président de la Chambre des représentants et président de l’Union parlementaire arabe (UPA) a accordé une interview à la chaîne égyptienne On Live, en marge du 23ème Congrès de l’UPA.
Commentant la crise dont souffre le monde arabe ces dernières années, le président de la Chambre des représentants a confié au journaliste égyptien Youssef El Houceini : « Je ne suis pas pessimiste, mais nous devons rattraper le temps que nous avons perdu. S’il y a un sursaut, de l’ambition et de l’audace dans la prise des décisions et également une vision de ce que     nous devons être à l’horizon de 2050 à titre d’exemple, je suis convaincu que la raison arabe deviendra juge et acteur influent».
«Nous vivons en marge de l’histoire», a martelé Habib El Malki. Et pour sortir du marasme intellectuel et politique qui sévit dans le monde arabe, il a affirmé que «le monde arabe a besoin d’une nouvelle raison. La régression culturelle a défait la raison et affaibli la logique et nous vivons des guéguerres sans enjeux et nous sommes incapables de faire face aux défis : défi de la mondialisation, défi de l’existence et de mise en place des stratégies dans le domaine économique et culturel entre autres pour préserver la dignité des citoyens arabes quel que soit le pays où ils vivent».
Concernant la question du terrorisme, Habib El Malki a soutenu que ce fléau est devenu un phénomène «mondialisé». Les racines de ce mal sont intimement liées à des causes à la fois endogènes et exogènes.
Parmi les raisons endogènes, il a cité l’exclusion des jeunes, l’interprétation erronée des préceptes de l’Islam qui est en réalité «une religion du juste milieu et de la modération, une religion de l’ouverture, de la tolérance et de l’acceptation de l’Autre». «Cette interprétation erronée et cette révolte contre les valeurs humaines expliquent pourquoi nos sociétés se sont précipitées dans l’abîme de la violence et de l’extrémisme», a-t-il soutenu.
«Il faut trouver des solutions radicales », a-t-il précisé. Selon le président de la Chambre des représentants, une solution importante est celle de la participation des jeunes auxquels il faut redonner confiance en l’avenir et aux politiques publiques qui doivent œuvrer à  préserver leur dignité et assurer des conditions à même de leur permettre d’être actifs et influents dans la prise des décisions».
Habib El Malki a évoqué l’expérience du Royaume du Maroc pour faire face à ce mal. «Nous avons choisi dès le début le multipartisme politique et la diversité culturelle et nous avons opté pour la tolérance et la cohabitation entre les religions, comme c’est le cas en Egypte où le christianisme, le judaïsme et l’Islam cohabitent, en plus d’autres pratiques religieuses séculaires». Et de préciser : «La richesse de cette diversité doit être préservée et défendue avec force, conscience et vigilance. L’histoire nous a toujours  enseignés que la préservation de la diversité est un élément qui permettra de sauvegarder la continuité des sociétés, des Etats et des institutions. C’est cela ce qui caractérise le Maroc, et ce depuis l’indépendance en 1956 jusqu’à nos jours. Et c’est ce que les autres appellent l’exception marocaine».
Un autre élément qui explique cette exception, selon Habib El Malki, est le rôle prépondérant de l’institution monarchique qui «constitue un élément central dans la préservation de la stabilité et de la pérennité de l’Etat». Cette institution joue également un rôle important dans tout ce qui a trait «à la révision, à la critique et à la rénovation» et dans la «gestion de la chose religieuse, la mise en place des règles et des lignes rouges à ne pas franchir et l’attachement à la religion musulmane en tant que religion du juste milieu, tolérante et ouverte sur l’Autre quelles que soient son opinion et sa religion».
Concernant la question du séparatisme dans le monde arabe, Habib El Malki a mis en avant le rôle des interventions étrangères dans la balkanisation du monde arabe. A cet égard, il a affirmé que la seule manière de faire face à cette situation est de garantir l’indépendance de la prise des décisions, la rénovation de la raison arabe et la réforme de toutes les institutions qui pourraient permettre l’unité des positions des peuples arabes.
Habib El Malki s’est inscrit en faux contre tous ceux qui prétendent que la Ligue arabe n’a plus raison d’être. «Nous avons besoin de la Ligue arabe, mais avec une nouvelle forme, de nouvelles prérogatives et des outils et des mécanismes renouvelés en vue de prendre de bonnes décisions », a-t-il précisé.
«Est-ce que la Ligue arabe a besoin d’une force militaire arabe dont plusieurs leaders ont tant rêvé et qui n’a pas été concrétisée jusqu’à présent ?», s’est interrogé le journaliste égyptien. Et Habib El Malki de répondre : «Tout d’abord, cette force militaire que vous évoquez est intimement liée à la force politique. Il y a une logique dialectique dans l’action. Pour cela, il est impératif de réformer profondément la Ligue arabe pour qu’elle soit une institution crédible et influente dans la prise des décisions aux niveaux régional et international ».
Quid de l’UPA ? Le président de la Chambre des représentants a souligné que  « nous soutenons toutes les formes de coordination en vue de parvenir à des solutions communes. Et l’UPA joue ce rôle depuis les années 70. Il y a évidemment des questions qui unifient les Parlements arabes et notamment la question palestinienne et la lutte contre le terrorisme ».
Concernant la question palestinienne, Habib El Malki a affirmé que la Ligue arabe doit œuvrer premièrement à unifier les Palestiniens surtout en cette conjoncture très délicate après le transfert de l’ambassade des Etats-Unis à Al-Qods. Une telle décision, selon lui, enfreint la légalité internationale.
Un autre sujet évoqué lors de cet entretien est celui ayant trait à la situation en Libye. A cet égard, Habib El Malki a souligné que le Maroc a pris plusieurs initiatives visant à trouver une solution à la crise libyenne. Il a également rappelé l’accord de Skhirat que tout le monde considère comme une plateforme importante en vue de parvenir à une solution politique consensuelle. « Nous sommes ouverts à toutes les initiatives dans ce sens et nous les soutenons pour garantir l’équilibre dans l’édification du nouvel Etat en Libye. Notre objectif est de sauvegarder l’unité de ce pays». Pour Habib El Malki, si la situation chaotique dans ce pays maghrébin perdure, cela aura un impact direct sur les pays limitrophes notamment l’Egypte. « Et tout ce qui met en danger la stabilité de l’Egypte met en danger la stabilité de toute la région», a-t-il précisé.
Concernant les relations entre Rabat et Le Caire, Habib El Malki a mis en exergue la profondeur des relations bilatérales entre le Royaume du Maroc et la République d’Egypte, tout en rappelant le rôle important de ce pays dans la lutte du Maroc pour son indépendance en accueillant plusieurs leaders du Mouvement national marocain.

 

Mourad Tabet

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