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«Notre pays a besoin d’un grand effort législatif et nous avons besoin de rénover notre législation notamment celle qui remonte à la période coloniale et au début de l’indépendance. Nous avons besoin de libérer notre législation des complications qui se dressent devant la dynamique politique, économique et sociale», c’est le constat fait par le Président de la Chambre des représentants Habib El Malki lors d’une journée d’étude organisée avant-hier par la même Chambre sur la manière de promouvoir les initiatives législatives des parlementaires.


Selon Habib El Malki, la législation doit suivre et encadrer la dynamique de la société dans tous les domaines : politique, économique, culturel, sociétal.
Le Parlement marocain a adopté 1507 textes législatifs depuis 1963, mais le nombre de  propositions de loi qui ont été adoptées durant 53 ans d’action parlementaire n’a pas dépassé 107 propositions, soit 7,1 %.
Les raisons de cet état de fait sont multiples. Il s’agit en premier lieu d’un déséquilibre entre le Parlement et le gouvernement en ce qui concerne les moyens, l’expertise et les informations. Le gouvernement dispose des moyens que le Parlement n’en a pas. Il dispose des informations nécessaires et des données qui lui permettent de préparer les projets de loi.
La deuxième raison réside dans la méfiance envers les initiatives des parlementaires, chose inadmissible dans certains cas, selon le Président de la Chambre des représentants.
Celui-ci a assuré que des gouvernements n’ont pas accepté des propositions de loi importantes qui avaient pour objectif de combler un vide juridique dans différents secteurs. Mais des années après, le gouvernement présente des projets de loi sur les mêmes sujets.
A titre d’exemple, une proposition de loi relative à la protection du consommateur qui a été déposée en 2003, alors que le gouvernement n’a déposé de projet de loi sur le même sujet qu’en 2011. Même sort pour la proposition de loi relative au droit d’accès à l’information  déposée en 2006, alors qu’un projet gouvernemental n’a été déposé qu’en 2016, soit 10 ans après. « Vous pouvez constater le coût social et économique de ce retard. Cela exige donc une collaboration entre les pouvoirs législatif et exécutif », a mis en avant Habib El Malki.
Il a par ailleurs mis en exergue le fait que la faible initiative législative des membres du Parlement est due à plusieurs obstacles. Il s’agit en l’occurrence de l’absence d’une étude d’impact des propositions de loi sur les autres lois en vigueur, sur une activité, sur l’économie ou sur les droits et les acquis sociaux ou un groupe social ou une organisation professionnelle.
La faiblesse de l’initiative législative des parlementaires réside également dans la faiblesse de la rédaction législative (utilisation des termes non juridiques ou des expressions littéraires…) et dans la structure du texte et sa subdivision, ce qui rend sa lecture difficile.
Le troisième obstacle, selon Habib El Malki, se rapporte au manque de communication concernant les propositions de loi, entre les représentants de la Chambre  et les membres du gouvernement pour les convaincre de l’importance de telle ou telle proposition et pour  s’assurer leur appui lors des discussions avant le  vote de la proposition.
Ces obstacles, d’après l’intervenant, ne sont pas une fatalité. Et pour les surmonter, Habib El Malki a proposé d’assortir toute proposition de loi d’une étude qui comprend le contexte de  proposition, ses impacts potentiels, ses objetifs, un exposé des motifs et la relation de ses dispositions avec d’autres lois en vigueur.
La deuxième proposition a trait à la légistique en vue de faciliter la compréhension et la lisibilité des propositions de loi. En ce sens, Habib El Malki a assuré qu’il prendra dans le cadre de la nouvelle structuration de la Chambre des représentants deux mesures importantes. La première permet de créer une unité administrative chargée de la légistique et d’appuyer les membres de la Chambre dans l’accomplissement de leur mission législative. La seconde concerne la création d’un centre d’études et de recherches parlementaires.
Le Président de la Chambre des représentants a proposé également que les initiatives législatives des parlementaires soient l’objet de discussions entre la Chambre des représentants et le gouvernement et que ces initiatives soient coordonnées entre les deux groupes parlementaires du même parti ou les formations politiques dans les deux Chambres du Parlement afin d’éviter que deux groupes proposent le même projet.
Lors de la même journée d’étude, le vice-président de la Chambre des représentants, Abdelaziz El Omari, a évoqué la problématique de la définition du concept de politique générale. Il a fait la distinction entre la politique générale élaborée par le gouvernement, les politiques publiques élaborées par deux ou plusieurs départements ministériels comme c’est le cas d’une politique publique sociale, et enfin une politique sectorielle élaborée par un département ministériel.
Rachid El Abdi, lui aussi vice-président de la première Chambre, a fait une lecture de l’expérience de la Chambre des représentants entre 2011 et 2016. Il a rappelé les altercations entre le gouvernement Benkirane et l’opposition composée à l’époque de 4 groupes parlementaires à propos de la répartition du temps d’intervention lors de la séance mensuelle consacrée aux questions se rapportant à la politique générale du gouvernement. C’est le gouvernement et sa majorité qui monopolisaient ce temps, mais un amendement du règlement intérieur de la Chambre des représentants en 2013 a permis de répartir équitablement le temps dédié à cette séance mensuelle entre l’Exécutif (un tiers), la majorité (un tiers) et l’opposition (un tiers).
Pour sa part, Abdelouahed Ansari, vice-président de la Chambre, a soulevé la problématique du rejet des propositions de loi par le gouvernement, tout en affirmant que celui-ci s’emploie à présenter parfois des projets de loi pour contrecarrer ceux présentés par des parlementaires.
Par ailleurs, la parlementaire et vice-présidente de la Chambre, Maelainine Amina, a présenté une lecture de la production législative  étalée sur  deux mandats législatifs 2007-2011 et 2011-2016, alors que le directeur de législation et du contrôle parlementaire à la Chambre des représentants, Boubker El Fqih Tétouani, a fait  un exposé sur les techniques et les règles nécessaires à la rédaction des normes juridiques tandis que le conseiller général chargé de la communication à la même Chambre, Aziz Mohib, a présenté un exposé sur la publication des propositions de loi sur le portail de la Chambre. Et de conclure qu’il est possible, techniquement parlant, de recevoir les avis des citoyens à propos des propositions de loi.

 

Mourad Tabet

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