Habib El Malki : La réforme nécessite une véritable mobilisation nationale impliquant gouvernement, partis, syndicats, secteur privé, société civile et tissu familial
Le président de la Chambre des représentants part de ce constat amer : «Tout le monde aujourd’hui reconnaît que notre système éducatif ne qualifie pas nos nouvelles générations » pour qu’elles puissent s’intégrer dans le marché du travail et la société du savoir. Il a, en outre, relevé qu’à la lumière des mutations sociologiques, culturelles, scientifiques et technologiques, l’école marocaine a besoin d’une réhabilitation profonde et globale, ajoutant que l’efficacité du système éducatif doit être évaluée en termes de gouvernance et de performance.
Pour Habib El Malki, la question de la réforme du système éducatif marocain n’est pas l’affaire d’une personne ou d’une seule partie, car il estime que « la responsabilité est collective, sociétale, historique et culturelle ; qui plus est, c’est une responsabilité politique», tout en soutenant que ce grand chantier nécessite de dépasser certaines pratiques qui ont conduit aux dysfonctionnements de ce système. Et de le président de la Chambre des représentants de déplorer : « Nous avons tant tenté de réformer notre système éducatif, et nous nous sommes rendu compte que nous perdions un temps précieux et des efforts à régler des différents et à apaiser les tensions pour arriver en fin de compte à une synthèse de visions, des référentiels divergents et parfois à des compromis qui n’étaient toujours nécessaires ».
Selon lui, le Maroc a accumulé un certain nombre de diagnostics nationaux et a même eu recours à des expertises internationales crédibles en la matière, tout en affirmant qu’il y a également d’autres référentiels sur lesquels s’appuie la réforme nationale du système éducatif marocain, notamment les discours de S.M le Roi Mohammed VI, la Constitution 2011 et la Vision stratégique de la réforme 2015-2030.
« Bien sûr, il faut tenir compte de tous les grands enjeux sociétaux lors de toute réflexion, planification, législation et mise en œuvre, en particulier des enjeux nationaux qui ont des aspects au niveau social, culturel, linguistique et des droits de l’Homme, sans oublier également l’enjeu de la régionalisation avancée et les possibilités de réforme de l’éducation à la lumière des revendication et des exigences de cette régionalisation sans préjudice de l’unité nationale du Maroc en tant qu’entité, identité, civilisation et culture diversifiée et ouverte ».
Il a, par ailleurs, considéré que la loi-cadre vise à placer la question de la réforme du système éducatif en tête des priorités nationales en tenant compte de la convergence des volontés des différentes composantes de la nation. Et de préciser que l’institution législative a un rôle important à jouer dans ce grand chantier, « en tant que pouvoir de soutien et d’accompagnement, non pas dans le sens de contrôle de l’action gouvernementale et d’évaluation des politiques publiques-qui est en fait un rôle constitutionnel évident-, mais en tant que pouvoir impliquée dans ce vaste projet de réforme parrainé par S.M le Roi et auquel nous croyons tous puisqu’il s’agit d’une des pierres angulaires du nouveau modèle de développement ».
S’inscrivant dans le cadre de l’accompagnement par la Chambre des représentants du processus de réforme des domaines de l’éducation, de la formation et de la recherche scientifique au Maroc, cette rencontre a été marquée par la présence de représentants du Parlement, du gouvernement et du Conseil supérieur de l’éducation, de la formation et de la recherche scientifique, ainsi que d’acteurs pédagogiques.
Il convient de rappeler que le projet de loi-cadre n ° 51.17 relatif au système d’éducation s’inscrit dans le cadre de la Vision stratégique de la réforme 2015-2030.
Ce projet de loi prévoit l’instauration du préscolaire et son ouverture à tous les enfants âgés de 4 à 6 ans, première étape avant son fusionnement progressif dans le primaire. Il prévoit également la scolarisation obligatoire des enfants de 4 ans à 16 ans et une approche pédagogique nouvelle, avec une modification du système d’évaluation et d’examen et d’obtention des diplômes. Les systèmes de l’orientation scolaire, professionnelle et universitaire vont être revus.
Dans ledit projet de loi, l’arabe sera considéré comme la principale langue de l’enseignement, alors que les langues étrangères les plus utilisées dans le monde seront renforcées, notamment dans les matières et spécialités scientifiques et techniques.
Saad Dine El Otmani : Le projet de loi-cadre, un acquis législatif sans précédent
Le projet de loi-cadre relatif au système de l’éducation, de l’enseignement, de la formation et de la recherche scientifique qui décline en dispositions les orientations et recommandations les plus importantes de la vision stratégique de réforme 2015-2030 méritait amplement que la Chambre des représentants lui consacre un séminaire d’une si haute facture.
En pour cause : ce système continue de faire parler de lui si fort et durant suffisamment longtemps pour que les autorités publiques s’en émeuvent avec autant d’allant que sa lente décrépitude n’a cessé de générer des problèmes qui, le temps passant, devenaient de plus en plus insolubles.
Se situant au cœur du projet de société de notre pays en raison des missions qu’elle se doit d’assumer dans la formation des jeunes générations et dans la réalisation des objectifs du développement, l’école se trouve, en effet, au centre des priorités et préoccupations nationales.
Il n’en demeurait pas moins qu’en dépit de l’importance des acquis qu’elle a réalisés, elle souffre manifestement de dysfonctionnements chroniques que le Conseil supérieur de l’éducation, de la formation et de la recherche scientifique a relevés en élaborant sa Vision stratégique. Laquelle a été déclinée en dispositions qui s’imposeront à tous après l’adoption de la loi-cadre idoine par l’instance législative.
Celle-ci leur a donc préalablement consacré son séminaire afin d’en prendre connaissance et de les étudier avant de les soumettre aux rigueurs du débat contradictoire des interventions en séances plénières.
Entre autres intervenants dans le cadre de cette journée d’étude, le chef du gouvernement, Saâd Dine El Otmani a indiqué que ce projet de loi-cadre qui se base sur la Vision stratégique 2015-2030 vise à assurer l’équité et l’égalité des chances, en vue de garantir un enseignement de qualité pour tous.
Le gouvernement a-t-il promis, soumettra ledit texte au Parlement dans les plus brefs délais et rappelé que l’Exécutif a entamé tôt la mise en œuvre de cette Vision en accordant la priorité au volet relatif à l’équité, à travers le lancement du préscolaire, tout en veillant à assurer « un niveau raisonnable » de justice territoriale et à promouvoir l’accès à l’éducation pour les enfants en situation de handicap.
Le chef du gouvernement a, aussi, noté que la réforme de l’éducation est la responsabilité de tous et que la réalisation des objectifs fixés par la Vision stratégique est tributaire d’une mobilisation générale, appelant à l’implication de la société civile, des syndicats, des experts et des professionnels dans ce chantier
Concernant la qualité de l’enseignement, deuxième pilier de cette stratégie, il a précisé que le gouvernement a lancé une série de programmes, notamment « L’enseignant de l’avenir », prévoyant une licence professionnelle en éducation, afin d’améliorer la rentabilité de l’enseignement
Pour sa part, le président de la Chambre des conseillers, Hakim Benchamach, n’a pas manqué de mettre en relief le fait que la réforme de l’école marocaine constitue un levier déterminant du projet sociétal et du modèle de développement escompté.
Il a également précisé que les dispositions du projet de loi-cadre relatif au système de l’éducation, de l’enseignement, de la formation et de la recherche scientifique, apporteront une légitimité juridique, une harmonie institutionnelle et une crédibilité politique au niveau de la réforme pédagogique à l’horizon 2030 et de l’efficacité des stratégies nationales relatives à l’école marocaine, ajoutant que ces mesures constitueront également une garantie essentielle en vue de réussir cette « réforme décisive ».
Il a, dans ce sens, souligné la nécessité d’assurer suffisamment de clarté, d’exhaustivité et de coordination aux dispositions de ce texte et de lui donner la force juridique, en tant que référent législatif encadrant la réforme pédagogique et un outil favorisant la mutation de l’école marocaine.
La déclinaison de la vision stratégique en loi-cadre exige le maintien sur le plan législatif de ses objectifs et des conditions adéquates pour sa mise en œuvre, à travers des mesures législatives, organisationnelles, financières et institutionnelles qui encadrent réellement cette opération et lui octroient une crédibilité politique, a poursuivi Hakim Benchamach en demandant à ce que ce projet de texte de loi soit entouré des garanties nécessaires pour en faire une référence juridique et un cadre contractuel national et collectif contraignant en matière de réforme du système de l’éducation, de la formation et de la recherche scientifique, ainsi qu’une base juridique de la vision stratégique, tout en garantissant la mobilisation globale pour sa mise en œuvre.
Il convient de rappeler, dans ce même ordre d’idées que le ministre de l’Education nationale, de la Formation professionnelle, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique, Saïd Amzazi, avait déclaré mardi 16 octobre courant devant la commission de l’éducation, de la culture et de la communication à la Chambre des représentants que le projet de loi-cadre 51.17 vise à consolider le rôle de l’école dans la réalisation des objectifs fondamentaux du système éducatif.
Lesquels objectifs concernent principalement la consolidation auprès des jeunes des constantes constitutionnelles de la nation, des valeurs nationales et universelles et de l’esprit d’appartenance au pays et la généralisation d’un enseignement de qualité ouvert sur les langues officielles et étrangères et à même de contribuer à un développement équilibré et équitable.
Pour atteindre ces objectifs, a-t-il ajouté, le texte identifie une série de mesures fondamentales de réforme, à savoir la protection de la petite enfance, à travers la généralisation de l’enseignement préscolaire pour l’ensemble des enfants de 4 à 6 ans, soulignant la nécessité de lutter contre la déperdition et l’abandon scolaire et d’accorder une priorité aux milieux rural et périurbain, afin de pallier les disparités territoriales en la matière.
Ces mesures, a-t-il noté, accordent également une attention particulière aux enfants à besoins spécifiques, pour concrétiser l’égalité des chances au profit de cette catégorie, et tendent à porter l’âge maximum de scolarité obligatoire de 15 à 16 ans, à faciliter l’enseignement des langues, à travers la mise en place d’une ingénierie linguistique basée essentiellement sur le renforcement des langues officielles et celles étrangères, en particulier dans les matières et spécialités scientifiques et techniques, et à améliorer la formation professionnelle via sa réhabilitation et sa diversification, afin d’offrir de nouvelles opportunités d’emploi pour les lauréats.
Ce texte envisage aussi de généraliser l’enseignement obligatoire pour l’ensemble des enfants de 4 à 16 ans, d’élargir le soutien pédagogique, afin de garantir la poursuite du cursus scolaire jusqu’à la fin de l’enseignement obligatoire et de renforcer les programmes de soutien financier et social destinés aux familles démunies, a-t-il rappelé.
Concernant les ressources humaines, le projet prévoit d’instituer une charte contractuelle sur la déontologie, basée sur la corrélation entre les droits et les obligations, de réviser les programmes et les méthodes de formation de base au profit des cadres du secteur et de mettre en place des programmes annuels de formation continue et spécialisée au profit des cadres éducatifs.
Pour ce qui est du financement du système d’éducation, de formation et de recherche scientifique, le projet de loi propose notamment de développer des programmes de coopération et de partenariat et de renforcer les ressources financières du Fonds national de financement de la recherche scientifique et du développement technologique, a conclu le ministre.
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